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Monique Laforce - Des lilas à ciel ouvert Un indiscible parfum d'au-delà |
Geneviève Brisac - " Pour qui vous prenez-vous ?" En pointillés | Horia Badescu - "Abattoirs du silece" |
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Marie Nimier - "La reine du silence Une évidence. | |
"L'homme qui tombe" de Don De Lillo La chute de l'Occident |
Monique Laforce - Des lilas à ciel ouvert
Monique Laforce est poète et Québécoise, elle a publié quatre recueils aux sympathiques éditions Le Loup de Gouttière (1) dont Des lilas à ciel ouvert d'une absolue pureté.
Sans effusion, dans la rigueur d'une écriture taillée comme le granit, sans pathos mais sans fausse honte, elle pose la question ultime : comment vivre coupé en deux.
"Quand l'été nous coupera en deux une fois de plus, je serai l'ombre entre le soleil et toi. Je brûlerai toutes les feuilles aux heures muettes des souvenirs. J'aurai trahi ta mort avec tous les oiseaux prisonniers des murs déserts.
Egarée, transie, j'emprunterai le passage. Je marcherai en creux sur tes pas pour te continuer. Je persisterai à te prendre par la main pour jouer à la marelle. Je referai patiemment toutes nos saisons perdues. Ce sera juin ou dimanche." (p.34)
Ou encore :
"Moi qui ne suis désormais que ton absence, j'emplis de désordre la surface nette de l'avenir.
Je crie le silence, entre tes bras retombé." (p. 26)
Sans pudeur mais sans exhibitionnisme, avec la lente patience de celle qui tâtonne mais s'obstine à aller de l'avant, Monique Laforce avance par cercles concentriques et répétés : "Je suis dans cette errance de te perdre" redoute-elle (p.10). "Je rôde sous les escaliers. Dans l'errance de nous perdre." (p.16). "Tu as oublié"répète-t-elle au fil des pages pour ne pas avouer "tu ne peux plus" (p.27-29). Et ces répétitions sont plus que l'écho de da détresse, ce sont des balises pour ne pas se perdre dans sa souffrance. Et puis ce compte à rebours inversé, chronologie de la douleur ordinaire, "Du dernier jour de toi"au"neuvième jour de la détresse",au "dixième jour", à "Cette année-là" puis "cette semaine-là" pour revenir encore et toujours à
"Cette heure précise, la même sur toutes les horloges. Refuser de mourir à l'envers des miroirs. Les pierres dans la gorge.
Arc-boutée contre la porte, griffer la solitude.
Enjamber la maison tombée comme une robe." (p52-60)
Parce qu'au bout de ce chemin où l'âme se dépouille de ses derniers masques, au bout de cette prière lancinante :
"Du temps,
du temps,
donnez-nous
du temps." (p.95-98)
il reste la vie indéracinable et obsédante, comme le parfum du lilas en plein soleil. Et nous la croyons lorsqu'elle conclut : "Nous recommencerons. Je te dis que nous recommencerons. La vie. L'amour. Et même la mort." (p.100-102).
Et nous, échoués là, aux rives de l'absence, réalisons enfin que ce recueil n'est en fait qu'un long poème incantatoire écrit avec précision et précaution dont la voix toute en retenue n'en est que plus transparente de vérité.
(1) Les spectateurs du silence, Une chaise pour s'asseoir, 7... et celui qui nous occupe que je vous invite à découvrir pour les Québécois au 347 rue Saint-Paul, Québec G1K 3X1 (tél. : (418)694-2224 - fax : (418)694-2225) courriel : loupgout@videotron.ca ; et pour les Français à la Librairie du Québec, 30, rue Gay-Lussac, 75005 Paris (tél. : 01.43.54.49.02 - fax : 01.43.54.39.15) mél. : libquebec@noos.fr .
Monique Laforce - Des lilas à ciel ouvert
(illustré des oeuvres de Claude Fleury)
chez
Le Loup de Gouttière
(Québec, 2000) - 10€
ISBN: 2-89529-028-8